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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

me dit et je ne peux contenter personne ! Eh bien ! puisque mon service ne vous plaît pas, je ferai ce que vous me dites. Demain je viderai la maison et je m’en irai ! – Oui, fais cela, » dit le maître. Le lendemain le marchand se leva et dit à Ulespiègle : « Mange et bois tant que tu voudras, et va-t’en. Je m’en vais à l’église ; que je ne te retrouve pas ici ! » Ulespiègle ne dit mot. Dès que le marchand fut sorti, il commença à prendre chaises, tables, bancs et le reste, et tout ce qu’il put porter ou traîner il le mit dans la rue, batterie de cuisine et tout. Les voisins s’émerveillaient et se demandaient pourquoi on mettait tout cela dehors. Le marchand fut averti de ce qui se passait ; il accourut et dit à Ulespiègle : « Bon serviteur, que fais-tu ? Je te retrouve encore ici ! – Oui, monsieur ; je voulais d’abord faire ce que vous m’avez commandé ; vous m’avez dit de vider la maison et de m’en aller ensuite. Veuillez me donner un coup de main : ce tonneau est trop lourd ; je ne peux le remuer tout seul. – Laisse cela, dit le marchand, et va-t’en au diable ! C’est bien assez que tu m’aies mis tout cela dans la crotte ! – Seigneur mon Dieu ! s’écria Ulespiègle, n’est-ce pas merveille ? Je fais tout ce qu’on me dit et je ne peux contenter personne ! Bien sûr, je suis né sous une mauvaise étoile ! » Là-dessus il s’en alla, et laissa le marchand porter et traîner dans la maison ce qu’il avait mis dehors, à la grande jubilation des voisins.