CHAPITRE LXVII.
qui avait perdu sa bourse.
l y avait autrefois à Gerdaw, dans le pays de
Lunebourg, un vieux et une vieille qui étaient
mariés ensemble depuis environ cinquante ans,
et qui avaient eu des enfants qu’ils avaient élevés et
établis. Le curé qui était alors en cet endroit était
un rusé compère, qui aimait à se trouver là où l’on
mangeait de bons morceaux. Il s’était arrangé avec
ses paroissiens de telle sorte que chacun d’eux devait
l’inviter au moins une fois l’an, et le nourrir, ainsi
que sa servante, un jour ou deux, et le traiter le
mieux possible. Or, les deux vieillards en question
n’avaient eu depuis bien des années ni baptêmes,
ni autres fêtes qui eussent offert au curé l’occasion
de se régaler à leurs dépens. Cela le vexait, et il
cherchait en lui-même comment il pourrait les porter
à lui offrir une collation. Il envoya chercher le vieux
paysan pour lui demander depuis combien de temps
il était marié. Le paysan répondit au curé : « Monsieur
le curé, il y a si longtemps, que je l’ai oublié. –
C’est un état fâcheux pour votre âme, dit le curé. Si
vous êtes ensemble depuis cinquante ans, la vertu
du mariage a cessé, comme celle des vœux des
moines. Parle de cela à ta femme, et reviens me
voir et me rendre compte des choses, pour que je