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Les langues et les nationalités au Canada


Une nation, une langue ?


« Une nation, une langue, » telle est l’idiotie récemment sortie du cerveau fêlé de je ne sais quel fanatique francophobe, et acceptée immédiatement comme un axiome indiscutable par la presque totalité de la population anglaise du Canada. Or, pour prétendre que l’unité de langage est nécessaire à l’unité nationale, et que celle-ci s’établit automatiquement aussitôt que le peuple est devenu unilingue, il faut ignorer complètement l’histoire des siècles passés et ne rien connaître des conditions d’existence des nations contemporaines.

Cette ignorance, d’ailleurs, ne m’étonne pas de la part de nos Anglo-Canadiens. Car, dans leurs écoles unilingues, on donne peut-être un enseignement pratique, quoique, jusqu’à ce jour, je n’aie pu discerner en quoi il consiste, mais, il est certain que le bagage historique qu’on y distribue est extraordinairement léger. Tous les Anglais avec lesquels j’ai été en relations me semblent, en effet, avoir puisé leurs connaissances historiques dans les romans et les nouvelles publiés dans les magazines. Et, remarquez bien que je ne parle pas ici des gens du peuple, n’ayant reçu qu’une éducation primaire élémentaire. Je parle de la classe instruite, ou soi-disant telle. Il nous en arrive comme cela de temps en temps, qui, pleins de compassion pour notre ignorance de « sauvages, » entreprennent de faire notre éducation. Ainsi, l’autre jour, j’en écoutais un nous faire un exposé de la manière dont les choses se passent dans les différents pays d’Europe. C’était mirobolant, on aurait dit que notre homme avait vu