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LES LANGUES ET LES NATIONALITÉS AU CANADA

anglais de traiter les Canadiens-français avec plus d’équité, et de l’autre, d’inspirer à ceux-ci un sincère loyalisme envers la couronne britannique. Mais elle eut, par contre, le fâcheux résultat d’imposer aux Canadiens-français un bien désagréable voisinage.

En effet, après la proclamation de l’indépendance américaine, beaucoup de colons de la Nouvelle-Angleterre, sous prétexte de loyalisme à la couronne d’Angleterre, vinrent s’établir au Canada. Ils se fixèrent surtout dans le Haut-Canada, où les établissements français avaient été ruinés pendant les dernières guerres ; et, comme c’étaient surtout des établissements militaires, les Canadiens-français les avaient à peu près complètement, abandonnés depuis la cession, ainsi que nous l’avons dit dans l’article précédent. De la sorte, entre le Bas-Canada et le lointain Nord-Ouest, il s’établit un barrage de population à peu près complètement anglaise, au milieu de laquelle il resta cependant toujours quelques centres de population française.

Or, parmi les nouveaux colons du Haut-Canada, quelques-uns étaient, sans doute, amenés là par un louable sentiment de loyalisme et de fidélité à leur roi. Mais la plupart étaient poussés par des sentiments beaucoup moins nobles. Les ambitions déçues, les rancunes et les jalousies politiques, la nécessité de se mettre à l’abri de vengeances excitées par des actes plus ou moins avouables commis pendant les dix années que dura la guerre de l’indépendance américaine, tels furent incontestablement les motifs qui déterminèrent beaucoup des nouveaux immigrants à quitter le territoire de l’union américaine pour se fixer au Canada.

Quels que fussent d’ailleurs les motifs qui les déterminèrent à y venir, presque tous y arrivèrent avec l’ancien esprit bostonnais dans toute sa plénitude. Bostonnais ils étaient, Bostonnais ils sont restés, jusqu’à aujourd’hui.

Quelques États de l’union américaine gardent encore, eux aussi, de trop nombreuses traces de ce Bostonnisme étroit et rétrograde, dans leurs législations locales. Mais, d’abord, la fraternité d’armes avec les gentilshommes français pendant la guerre de l’Indépendance, puis la nécessité de s’instruire un