Page:Anonyme - Les langues et les nationalités au Canada, 1916.djvu/65

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Mais, au Canada, nos gouvernants sont tellement à l’envers de la logique que, vous le savez aussi bien que moi, c’est juste le contraire qu’ils font.

Ils commencent d’abord par appliquer le principe de canadienne logique, que, le pays étant bilingue, tous les employés du gouvernement et les directeurs des services publics doivent être des Anglais unilingues, et tous les documents publics rédigés uniquement en anglais.

Puis, avec un sens de profonde politique, devant lequel nos petits-neveux se pâmeront certainement d’admiration, ils en viennent à la conclusion que, la langue anglaise faisant courir à l’indépendance du Canada des dangers très sérieux, tous les efforts du gouvernement fédéral et des divers gouvernements provinciaux doivent se concentrer pour en favoriser la prépondérance, aux dépens de la langue française, qui offre le grand inconvénient de sauvegarder les intérêts de l’Angleterre et du Canada au détriment des États-Unis.

Et les Canadiens-français sont tellement éblouis par les éclairs de cette fulgurante logique et par les éclats de ce tonitruant bon sens, qu’en étant tout ahuris, ils reconnaissent, sans plus, l’obligation primordiale pour tout habitant du Canada, d’apprendre l’anglais et de le parler, après quoi, ils se risquent timidement à bêler quelques réclamations, pour qu’on leur permette quand même de faire enseigner leur langue à leurs enfants. Car, ajoutent-ils avec l’admirable logique propre au pays, la langue française est langue officielle au Canada aussi bien que la langue anglaise…

Mais, simpletons que vous êtes, si la langue française, comme c’est le cas, est officiellement l’égale de la langue anglaise, pourquoi admettre qu’un Anglais quelconque a le droit de vous imposer la connaissance et l’usage de la langue, alors que dans aucune partie du Canada, l’idée n’est venue à personne d’obliger un Anglais à apprendre le français ? Vous proclamez qu’officiellement et constitutionnellement la langue française est l’égale de la langue anglaise ; mais, de fait, vous la placez vous-mêmes dans une position secondaire et inférieure.

Vous admettez, en pratique, que la langue anglaise est le seul instrument régulier de communication, la seule véritable