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les langues et les nationalités au canada

Mais entre ces deux groupes tapageurs et bruyants, il existe une immense majorité d’Anglais de bonne foi, qui suivent les dires des deux groupes précédents, parce qu’ils ne connaissent pas l’état réel des choses. À ceux-là, il suffira de montrer le péril américain, tel qu’il est, pour les faire déserter immédiatement l’armée des francophobes et les disposer à reconnaître les droits de la langue française dans toutes les provinces du Canada. Mais, comme ils sont accoutumés à vivre à côté de ce danger, ils ne le remarquent pas et ils ne le verront que si on le leur montre.[1]

Aussi, comme la plupart des écrivains canadiens-français écrivent l’anglais beaucoup mieux que les publicistes anglo-canadiens, ils devraient écrire souvent des articles sur ce sujet, dans les journaux anglais. Les plus fanatiques de ceux-ci ne voudront sans doute pas publier de tels articles. Mais, je crois que beaucoup les accepteraient, au moins dans leurs colonnes de tribune libre. C’est le seul moyen d’atteindre le public anglais, qui, ne pouvant lire ce qui se publie en français, est tenu, de propos délibéré, dans l’ignorance du danger imminent qui menace l’existence même du Canada, beaucoup plus qu’il ne met en péril la survivance de la langue française, qui, même après l’annexion du reste du Canada, pourrait se retrancher dans le Québec, à l’ombre du drapeau britannique.

Quant à ces races diverses et hétérogènes, qu’on a si imprudemment implantées au Canada et dont on nous a si libéralement pourvus dans l’Ouest, je ne vois pas qu’il y ait, pour le moment, autre chose à faire qu’à subir patiemment les conséquences de la bêtise commise, en laissant les choses aller leur train.

Dans l’avenir, que deviendront tous ces groupes étrangers ? La Providence qui se sert de la bêtise et de l’imprévoyance des hommes pour les faire travailler à leur insu à ses desseins secrets, a certainement eu, en permettant cette monstrueuse bêtise, des vues fort différentes de celles de nos prétentieux politiciens ; vues qui se manifesteront plus tard, mais qu’il nous est impossible de deviner actuellement.

  1. Voir note, page 49.