Page:Anonyme - Macaire, chanson de geste.djvu/14

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Préface.

heureuse reine, l’interroge, se persuade de son innocence, et détourne Charlemagne de la livrer au supplice, d’autant plus qu’elle s’est déclarée enceinte. Alors, sur l’avis du duc Naimes, son sage conseiller, le roi lui fait grâce de la vie, et la bannit seulement de son royaume. Un jeune damoiseau nommé Aubri est chargé de la conduire en exil. Il part avec elle, au grand regret de chacun et de Charlemagne lui-même.

Macaire aussi, mais par un autre sentiment, voit ce départ avec un cruel déplaisir : sa vengeance lui échappe. Pour la ressaisir, il s’arme, monte à cheval, et s’élance à la poursuite de l’exilée et de son compagnon. Il les rejoint, somme Aubri de lui abandonner la reine, et, sur son refus, l’attaque et le tue. Effrayée à la vue du combat, la reine s’est enfuie dans un bois voisin. Macaire ne la retrouve pas, et revient à Paris chargé d’un crime de plus.

Aubri avait un lévrier qui le suivait partout. Le lévrier ne le quitte point, même après sa mort. Il reste là trois jours, et ce n’est que vaincu par la faim qu’il reprend le chemin de Paris. Il arrive à l’heure du dîner, court au palais, où les barons sont à table, aperçoit Macaire, se jette sur lui, le mord cruellement au visage, prend du pain sur la table et s’enfuit pour retourner auprès de son maître, laissant toute la cour dans l’étonnement. Les barons se demandent si Aubri est déjà de retour. Ils ont bien cru reconnaître son lévrier. Le chien revient une seconde fois à la même heure ; mais les gens de Macaire sont sur leurs gardes ; il ne peut l’atteindre et s’en retourne encore avec du pain.