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Préface.

posée la chanson de la Reine Sibile[1] ; mais, cela même admis, il faut reconnaître que l’invention du fameux duel transforme le chien de l’antiquité en un chien du moyen âge et donne à sa fidélité une couleur tout à fait locale. On peut douter du mérite de cette invention, mais il est surabondamment prouvé qu’elle frappa beaucoup et fut très-goûtée. Sans parler des bonnes gens qui y ont ajouté foi depuis le XIIe siècle jusqu’à nos jours, et pour rester au point de vue littéraire, deux auteurs au moins, certainement postérieurs au nôtre, l’ont trouvée si heureuse qu’ils l’ont imitée.

L’un d’eux surtout eût sagement fait de n’y point songer : c’est celui qui s’avisa de substituer au chien un champion fort peu digne d’un tel rôle, un singe. Dans la version en prose et très-amplifiée du poëme si connu d’Amis et Amiles, l’histoire des deux compagnons se prolonge fort au delà de leur mort. Ils ont été tués tous deux par Ogier en Lombardie ; Lubias, femme d’Amis, apprend cette nouvelle et va la porter à Bellissant, veuve d’Amiles, qui a laissé deux enfants : Anceaulme et Florisset. Lubias empoisonne Bellissant, s’empare des enfants d’Amiles et veut les faire noyer. Ils sont sauvés par deux cygnes. Un singe aussi s’intéresse aux jeunes héritiers d’Amiles, et prouve le crime de Lubias en combattant contre Lambert son champion, qui est ignominieusement vaincu[2].

  1. Dans la quatrième Chiliade, où Tzetzès dit que pareil trait s’était renouvelé de son temps.
  2. Voyez le récit de ce combat dans l’édition de Verard, fol. lxxiiii-lxxvii.