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iii. - les divers états du poème

(6) Les deux adversaires se rendent auprès du roi, et, ayant donné leurs ôtages, conviennent de vider leur querelle par le duel. Le combat dure trois jours sans résultat. Au bout de ce temps, le roi intervient, et, sur son ordre, les combattants remettent leurs armes à leurs ôtages. Bientôt le jugement des hauts hommes du palais met fin à la querelle, et la paix est rétablie. Mais toutefois, la rancune de ces luttes passées dure encore maintenant dans le cœur des hommes du Vermandois et du Cambrésis[1].

(7) Après cela, la volonté divine enleva de ce monde le jeune Bernier. Son père en éprouva une vive douleur. Il résolut de racheter les fautes de sa vie passée et fonda, de concert avec son épouse Hersent, l’abbaye de Saint-Michel en Thiérache.

Ces récits ont sans doute été pris par l’auteur de la chronique de Waulsort pour de l’histoire authentique, et nous partagerions probablement la même illusion, si la comparaison avec notre Raoul de Cambrai ne nous avertissait que le chroniqueur a simplement analysé une chanson de geste en vogue de son temps. Cette chanson de geste était-elle exactement celle que Bertolais composa peu après les événements, c’est-à-dire vers le commencement du xe siècle au plus tard ? Nous n’oserions l’affirmer. Entre l’époque où composait Bertolais et la date

  1. Cette assertion est probablement tirée de la chanson qu’analysait le moine de Waulsort : on en retrouve, vers le temps de Philippe Auguste, un écho ou une imitation dans ces quatre vers d’une suite du fameux poème des Lorrains, où l’on sait qu’un jongleur intercala la légende de Raoul de Cambrai :

    Car la haïne dure encor par verté,
    Par Loheraine et par Breibant dalés ;
    Ne faura ja, jel vos dis por verté,
    Car ensi l’a Damedeus estoré.

    (Histoire littéraire de la France, XXII, 640.)