Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 17.djvu/101

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monsieur, qui vous flattez d’avoir l’oreille de votre souverain, vous qui prétendez en être toujours écouté favorablement, je croirois que, pour mériter sa confiance, il faudroit au moins s’intéresser davantage au bien public. Oh ! parbleu, je n’y tiens plus, dit Damon en éclatant de rire ; voilà des réflexions qui me paroissent du premier rare. Permettez-moi de vous dire, belle dame, que vous êtes un peu misantrope : mais fi donc ; à votre âge, en vérité, cela est honteux. Je suis pétrifié de vous entendre : je serois tenté de croire que vous n’êtes pas de notre monde. J’ignore les usages qui se pratiquent sous le climat qui vous a vu naître ; mais apprenez qu’ici notre raison nous sert infiniment mieux : lorsqu’il arrive quelque événement qui intéresse la patrie, d’abord nous avons les yeux ouverts sur ce qu’il produira : souvent cet événement en fait naître mille autres, qui captivent également notre attention : on peut les comparer à des nuages qui se rassemblent : le premier est emporté par les vents ; un second lui succède qui nous amuse ; un troisième paroît, qui absorbe les deux premiers ; mais il sera lui-même anéanti dans un instant par une intrigue de cour. Ainsi de nouveaux projets nous amusent ; nous les saisissons avidement sans réfléchir, ni nous mettre en peine des suites qui doivent en résul-