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Les aventures

l’imperfection de cet outil. Et quoiqu’il m’eût coûté plusieurs jours à faire, néanmoins comme il n’étoit point garni de fer tout au tour, non-seulement il s’usa plutôt, mais encore cela étoit cause que j’en faisois mon ouvrage avec plus de difficulté, & moins de succès.

Mais je me résignois à tout cela, & supportois avec une patience égale, & la difficulté du travail, & le peu de succès dont il étoit suivi. Après que mon bled étoit semé, j’aurois eu besoin d’une herse ; mais n’en ayant point, je me voyois obligé de passer par-dessus ma terre avec une grosse branche d’arbre, que je traînois derrière moi, avec laquelle je grattois, pour ainsi dire plutôt que je ne hersois.

Quand mon grain étoit en herbe, ou en épis, ou en nature, de combien de choses n’avois-je pas besoin, comme je l’ai déjà insinué, pour le fermer d’un enclos, en écarter les bêtes & les oiseaux, le faucher, le sécher, le voiturer, le battre, le vanner & le serrer ! Après cela il me falloit un moulin pour moudre, un tamis pour passer la farine, un levain & du sel pour faire fermenter, un four pour cuire mon pain. Voilà bien des instrumens d’un côté, & de l’autre bien des ouvrages différens : je ferai pourtant voir que tous ceux-là me manquèrent, & que je ne manquai à aucun de ceux-ci. Mon blé m’exerçoit beaucoup ; mais aussi il m’étoit d’un plus grand