Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/332

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
326
Les aventures

mon rivage pour les tuer & pour les manger en vrais cannibales comme ils étoient.

Ce qui m’instruisit de ce que je viens de dire, étoit un spectacle que je vis alors sur le rivage du côté du sud-ouest, spectacle qui me remplit d’étonnement & d’horreur. J’aperçus la terre parsemée de crânes, de mains, de pieds & d’autres ossemens d’hommes : j’observai près de-là les restes d’un feu, & un banc creusé dans la terre en forme de cercle, où sans doute ces abominables sauvages s’étoient placés pour faire leur affreux festin.

Cette cruelle vue suspendit pour quelque tems les idées de mes propres dangers ; toutes mes appréhensions étoient étouffées par les impressions que me donnoit cette brutalité infernale. J’en avois entendu parler souvent, & cependant la vue m’en choqua comme si la chose ne m’étoit jamais entrée dans l’imagination. Je détournai mes yeux de ces horreurs ; je sentois naître de cruelles pensées, & je serois tombé en foiblesse si la nature ne m’avoit soulagé par un vomissement très-violent. Quoique revenu à moi-même, je ne pus me résoudre à rester dans cet endroit, & je tournai mes pas du côté de ma demeure.

Quand je fus éloigné de ce lieu horrible,