Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
31
de Robinson Crusoé.

ceux-ci par leurs débauches & leurs excès ; ceux-là par un trop rude travail, ou faute de nourriture & du nécessaire : il ajoutoit qu’une fortune médiocre étoit le siège de toutes les vertus, & de tous les plaisirs ; que la paix & l’abondance en étoient les compagnes ; que la tempérance, la modération, la tranquillité, la santé, la société, en un mot, tous les divertissemens honnêtes & desirables étoient attachés à ce genre de vie ; que par cette voie les hommes finissoient doucement leur carrière, & la finissoient en paix, sans être soulés du travail des mains, ni de celui de l’esprit ; sans se livrer à une vie servile pour gagner leur subsistance, ni à une suite continuelle de perplexités, qui troublent la tranquillité de l’ame & le repos du corps ; sans sentir en soi-même ni la rage de l’envie, ni les aiguillons cuisans de l’ambition ; mais, au contraire, jouissant des commodités de cette vie, en goûtant les douceurs & non les amertumes ; sensibles à leur propre bonheur, & apprenant par une expérience journalière à l’affermir de plus en plus.

Après quoi il m’exhorta dans les termes les plus pressans & les plus tendres, à ne point faire un pas de jeunesse, à n’aller pas au-devant des calamités, dont la nature & ma naissance m’avoient mis à couvert ; que je n’étois pas dans la nécessité d’aller chercher mon pain ; qu’il feroit tout pour