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Les aventures

Nigritie de l’autre, est entièrement déserte & seulement habitée par des bêtes féroces. Il y avoit autrefois des Nègres, qui l’ont abandonné depuis, & se sont retirés plus avant du côté du Sud, de peur des Maures ; ceux-ci ne se sont pas souciés d’y demeurer à cause de sa stérilité : & ce qui pouvoit également éloigner les uns & les autres, c’est la quantité prodigieuse de tigres, de lions, de léopards & d’autres animaux furieux qui infestent le pays ; ensorte que les Maures n’y vont jamais que pour chasser, & cela au nombre de deux ou trois mille hommes à la fois. En effet, dans l’étendue de près de cent milles, nous ne voyions que de vastes déserts pendant le jour, & nous n’entendions qu’hurler & rugir pendant la nuit.

Il me sembla plus qu’une fois, que je voyois de jour le mont Picot de l’Isle Teneriffe, l’une des Canaries : j’avois grande envie de mettre au large, pour essayer si je ne pourrois pas l’atteindre ; c’est ce que je voulus faire par deux fois ; mais toujours les vents contraires, & la mer trop enflée pour mon petit bâtiment, me forçoient à rebrousser. Cela me fit résoudre à continuer mon premier dessein qui étoit de côtoyer.

Après que nous eûmes quitté cet endroit-là, nous fûmes souvent contraints de prendre terre pour faire aiguade : une fois entr’autres, qu’il étoit.