Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 20.djvu/48

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grand-prêtre : ce diſcours l’avoit troublé, & le fond de son ame étoit combattu par les endroits les plus ſenſibles. Le préjugé dans lequel il étoit né, lui donnoit une tendreſſe de père pour les peuples qu’on alloit détruire, qui l’agitoit de la plus vive compaſſion ; des endroits qui le touchoient de plus près, le faiſoient trembler ; & quelque parti qu’il prît, il ne pouvoit empêcher la perte de ce qui lui étoit le plus cher. Lamékis étoit époux & père : la reine l’ignoroit ; & ce ſecret révélé faiſant naître la jalouſie de Sémiramis, & lui apprenant la cauſe de l’obſtacle qu’il avoît apporté à ſon amour, ne pouvoit que hâter la mort de ceux qui lui étoient ſi chers ; mais ne prévoyant cependant pas que des complaiſances de ſa part puſſent lui faire éviter tous ces maux, il aima mieux périr vertueux que d’échapper au trépas en s’abandonnant au crime, & en fouillant ſon miniſtère ; il parla dans ces ſentimens. Sémiramis employa ſes charmes & ſes pleurs pour le ſéduire. Semblable au roc battu des ondes, la vertu de Lamékis le ſoutint dans ces combats périlleux ; ſa fermeté s’expliqua, & ne donna aucun lieu d’eſpérance. La haine ſuccéda à l’amour : la fin de cette importante converſation fut un ordre de livrer le grand-prêtre à la fureur du peuple,