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à Saint-Cloud

fus faire mes adieux à tous mes voisins, mes parens & mes amis, & je payai tout ce que je devois dans le quartier, à ma blanchisseuse, à mon perruquier, à ma fruitière, & aux autres. J’avois toujours ouï dire que l’air de la mer étoit mal-faisant à ceux qui n’y étoient point habitués de jeunesse ; & pour m’y accoutumer petit-à-petit, j’allois tous les jours me promener sur les bateaux des blanchisseuses pendant une heure ou deux : je passois l’eau aussi de temps en temps du port Saint-Nicolas aux Quatre-Nations, & j’ai continué cette manœuvre jusqu’à mon départ, de sorte qu’insensiblement je m’y suis fait.

Quand je fus à la veille de partir, quoique l’on m’eût assuré que je trouverois des vivres dans le navire sur lequel je devois m’embarquer pour aller à Saint-Cloud, & qu’on m’eût dit que le sieur Langevin, qui en est le munitionnaire général, & entrepreneur des vivres en cette partie de la marine, ne manquoit de rien, & étoit pourvu de tout ce qui pouvoit contribuer à la commodité des voyageurs, je fis toujours, par précaution, acheter un grand panier d’osier fermant à clef, dans lequel je fis mettre un biscuit de trois sous, du palais-royal (car j’ai retenu de quelqu’un qu’il ne falloit jamais s’embarquer sans biscuit), un petit pain