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PRÉFACE.

même d’une traduction ? C’est un Chinois qui écrit au IVe siècle de notre ère. Le cœur humain est partout le même. Tout change avec le climat et la race : mœurs, langage, religion, gouvernement ; mais les mêmes passions agitent le barbare et l’homme civilisé, l’Arabe sous sa tente et l’Européen dans sa maison. En tout pays, dans tous les âges, s’élève ce cri de l’âme qu’on nomme la poésie.

Cette réflexion, banale aujourd’hui, eût étonné nos pères au temps de Louis XIV. Pour eux la poésie avait été le privilège de la Grèce. Athènes avait servi de modèle aux pâles imitations des Latins ; Racine mettait sa gloire à traduire Euripide, et Fénelon à copier Homère. Tout au plus admirait-on l’Arioste et le Tasse, comme d’ingénieux disciples de Virgile. Voltaire est le premier qui, presque malgré lui, ait reconnu le génie de Shakspeare et de Milton. Et c’est seulement sous la Restauration que l’école romantique, rompant avec une admiration traditionnelle, a laissé les imitateurs de la Grèce pour s’éprendre de Gœthe et de Calderon.