Page:Apollinaire - Calligrammes.djvu/66

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Je les sentais monter en moi et s’étaler les contrées où
elles serpentaient

Avec les forêts les villages heureux de la Belgique
Francorchamps avec l’Eau Rouge et les pouhons
Région par où se font toujours les invasions
Artères ferroviaires où ceux qui s’en allaient mourir
Saluaient encore une fois la vie colorée
Océans profonds où remuaient les monstres
Dans les vieilles carcasses naufragées
Hauteurs inimaginables où l’homme combat
Plus haut que l’aigle ne plane
L’homme y combat contre l’homme
Et descend tout à coup comme une étoile filante


Je sentais en moi des êtres neufs pleins de dextérité
Bâtir et aussi agencer un univers nouveau

Un marchand d’une opulence inouïe et d’une taille prodigieuse

Disposait un étalage extraordinaire
Et des bergers gigantesques menaient
De grands troupeaux muets qui broutaient les paroles
Et contre lesquels aboyaient tous les chiens sur la route