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HISTOIRE DE Mlle BRION

Agée de quatorze ans et n’apportant rien à la maison paternelle, on commença à me faire sentir combien je devenais à charge à ma famille. J’ignorais alors, madame, qu’une jolie figure fût un patrimoine d’autant mieux assuré qu’on n’en peut manger que le revenu en altérant pourtant le fonds. Si mon âge, ou plutôt l’ignorance dans laquelle j’avais été élevée, m’avait permis de le soupçonner, mon père le premier me l’aurait appris.

Comme je n’avais point d’autre lit que le sien, étant le seul qui fût dans la maison, je me suis rappelée depuis que le bonhomme avait eu toutes les peines du monde à se faire au veuvage. J’attribuais alors, tant j’étais innocente, à l’amitié paternelle des caresses, qui certainement lui rappelaient les doux