Page:Apollinaire - La Femme assise.djvu/215

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« Durant les huit premiers mois de la guerre, je n’avais jamais trompé Hyacinthe. J’avais une petite amie, Geneviève, avec qui je sortais et allais souvent à Nanterre où était son ami. René, c’est le juif, me vit et me suivit jusque dans le train qui nous ramenait à Paris. Dans le wagon il nous fit tellement rire que nous ne pûmes faire autrement que de lier conversation avec lui. Cela se fit vite. Je ne l’aimais pas, mais il était si amusant et je m’ennuyais tellement. Plus tard, un jour que je me disputais avec lui, je lui tordis si fort la main que je lui cassai le petit doigt. Il parvint à faire croire qu’il se l’était cassé en service commandé et réussit à se faire réformer.

« Quand Hyacinthe vint en permission, il se doutait de quelque chose, car un grand nombre des lettres quotidiennes que je lui adressais venaient de Nanterre. Je lui avouai tout. Et il n’eut pas le courage de me faire des reproches, mais je le sentis si profondément désolé que je sus aussitôt qu’il serait tué. Et, depuis, je