Page:Apollinaire - La Femme assise.djvu/255

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L’or monnayé a ainsi pris peu à peu le caractère d’un talisman destiné à éviter une mutilation à ceux qui ont le malheur d’être faits prisonniers, blessés ou non.

J’ai connu une batterie où, au mois de mai 1915, grâce à la fabrication et au commerce (interdit depuis) des bagues, des ronds de serviettes, coupe-papiers, etc., parmi les hommes de troupe seuls, il n’y avait pas moins de cinq mille francs d’or, recueilli principalement chez les fantassins qui étaient les meilleurs clients des bijoutiers de l’artillerie.

Les appels réitérés du Gouvernement conseillant aux soldats de se débarrasser de leur or, afin de ne pas alimenter le trésor allemand au cas où ils tomberaient aux mains des ennemis, ont été transmis avec tant de discrétion qu’ils n’ont pas toujours été suivis d’effet. Et je crois bien que, dans ce cas particulier, l’infanterie a mieux compris que l’artillerie l’intérêt patriotique qu’il y avait à ne point conserver de l’or monnayé.

Cette manie de l’or a pris, la guerre