Page:Apollinaire - La Femme assise.djvu/88

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qu’elle m’éloignât de chez moi, j’ai compté jusqu’à douze barricades.

Ailleurs, devant une grande barricade barrant la rue Saint-Denis, à la hauteur de la rue Guérin-Boisseau, j’ai été pris pour un homme de la police, un mouchard[1], selon le mot populaire. Je n’étais pas fort rassuré et, malgré ma qualité d’Américain que je tentais en vain de faire constater, les émeutiers m’auraient fusillé si un représentant, illustre comme poète, M. Victor Hugo, n’était intervenu. Il m’interrogea et, après s’être enquis longuement des chutes du Niagara, des pilotis de Mexico, des coutumes, des usages et du cours de l’Orénoque, il me fit relâcher. Et devant les émeutiers qui l’écoutaient avec respect, il me dit textuellement : « Sage citoyen des États-Unis d’Amérique, vous témoignerez dans votre libre République des efforts que les Parisiens, ce peuple de Titans, accomplissent ici pour cimenter la proche

  1. En français dans le texte.