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LE POÈTE ASSASSINÉ

Et réciproquement
Il s’écria — Au nom de Marœ
Et de son gypaète préféré
Fille d’Arnammœr
Prépare la boisson des héros
— Parfaitement noble guerrier
Maï Maï ramaho nia nia

Elle prit le soleil
Et le plongea dans la mer
Ainsi les ménagères
Font tremper un jambon dans la saumure
Mais malheur ! les saumons voraces
Ont dévoré le soleil noyé
Et se sont fait des perruques
Avec les rayons
Maï Maï ramaho nia nia

Elle prit la lune et l’entoura de bandelettes
Comme on fait aux mortes illustres
Et aux petits enfants
Et puis à la clarté des seules étoiles
Les éternelles
Elle fit une décoction de selage
D’euphorbe de goudron de Norvège
Et de morve des Alfes
Pour donner à boire au héros
Maï Maï ramaho nia nia

Il mourut comme le soleil
Et la sorcière grimpée au haut d’un sapin
Écouta jusqu’au soir
La rumeur des grands vents engouffrés dans la fiole
Et les scaldes menteurs en donnent leur parole
Maï Maï ramaho nia nia