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LES SOUVENIRS BAVARDS

pour vous eût entravé ma liberté et qu’elle m’est plus chère que l’amour.

— Ainsi, blonde Olly, vous m’aimiez et cet amour est cause que je vous ai perdue ?

— Oui, Chislam, j’eusse fini par céder à vos instances et je vous eusse épousé. Mais en le faisant, c’est à mon art que j’aurais renoncé.

— Sauvage Olly, je vous attendrai toujours.

Et le dialogue continuait sur ce ton : l’indépendante Olly se refusant à accepter les propositions matrimoniales de l’amoureux Chislam.

Ce que je savais de la pruderie anglo-saxonne me força d’abord à m’étonner que dans la pension l’on tolérât des visites de femme chez mon voisin ; puis je n’y pensai plus.

Mon étonnement augmenta lorsque le matin suivant je fus réveillé par une nouvelle conversation qui s’échangeait cette fois en français, mais avec l’accent particulier des Américains de l’Ouest.

Chislam parlait encore avec une femme.

— Vous ne m’aimez plus, monsieur Chislam ! Vous êtes toujours autour d’Olly, la petite dresseuse de chiens, qui est maigre comme un manche