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L’AMI MÉRITARTE

L’ami Méritarte, qui voyait dans l’homme un animal artistique, s’efforçait de créer un art culinaire qui satisfît non seulement l’appétit et la gourmandise, mais s’adressât encore à l’intelligence comme font les autres arts.

Il y a près de deux ans que, dans sa petite salle à manger donnant sur la cour, au cinquième, rue Nollet, nous savourâmes à quatre le spectacle émouvant du premier drame comestible.

Les hors-d’œuvre, composés d’andouille de Vire et de filets de harengs saurs, avaient une apparence sinistre qui nous serrait le cœur tout en éveillant notre appétit, et la funèbre soupe aux lentilles qui parut ensuite ne laissait point de nous inquiéter