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LES ONZE MILLE VERGES

mise de nom à la famille et le grand-père et le père de Mony avaient chacun porté le titre de hospodar. Mony Vibescu aurait dû également porter ce titre en l’honneur de son aïeul.

Mais il avait lu assez de romans français pour savoir se moquer des sous-préfets : « Voyons, disait-il, n’est-ce pas ridicule de se faire dire sous-préfet parce que votre aïeul l’a été. C’est grotesque tout simplement ! » Et pour être moins grotesque, il avait remplacé le titre d’hospodar-sous-préfet par celui de prince. « Voilà, s’écriait-il, un titre qui peut se transmettre par voie d’hérédité. Hospodar, c’est une fonction administrative, mais il est juste que ceux qui se sont distingués dans l’administration aient le droit de porter un titre. Je m’anoblis. Au fond, je suis un ancêtre. Mes enfants et mes petits-enfants m’en sauront gré. »

Le prince Vibescu était fort lié avec le vice-consul de Serbie : Bandi Fornoski qui, disait-on par la ville, enculait volontiers le charmant Mony. Un jour, le prince s’habilla