Page:Apollinaire - Les Onze mille verges, 1911.djvu/86

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
68
LES ONZE MILLE VERGES


de ferraille du pont et à l’accompagnement sourd du train en marche. Des villages heureux animaient les rives dominées par les burgs centenaires et les vignes rhénanes étalaient à l’infini leur mosaïque régulière et précieuse.

Quand Mony se retourna, il vit le sinistre Cornabœux assis sur le visage d’Estelle. Son cul de colosse couvrait la face de l’actrice. Il avait chié et la merde infecte et molle tombait de tous côtés.

Il tenait un énorme couteau et en labourait le ventre palpitant. Le corps de l’actrice avait des soubresauts brefs, « Attends, dit Mony, reste assis. » Et se couchant sur la mourante, il fit entrer son vit bandant dans le con moribond. Il jouit ainsi des derniers spasmes de l’assassinée, dont les dernières douleurs durent être affreuses et il trempa ses bras dans le sang chaud qui jaillissait du ventre. Quand il eut déchargé, l’actrice ne remuait plus. Elle était raide et ses yeux révulsés étaient pleins de merde.

— Maintenant, dit Cornabœux, il faut se tirer des pieds.