Page:Apoukhtine - La Vie ambiguë.djvu/262

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pourquoi une envie irrésistible m’était venue tout à coup de voir Lydia, de la voir, rien de plus ; je ne songeais pas à lui parler, mais à rester avec Maria Pétrovna. Quel plaisir, en effet, pouvait lui procurer la vue de ma vieille figure fatiguée, quand brillaient autour d’elle tant de jeunes et joyeux visages ? Mais elle, on peut la regarder, il n’est défendu à personne de regarder le soleil, les étoiles, la coupole de Saint-Isaac, voilà les réflexions que je faisais en traîneau. Mais, si modeste que fût mon désir, je ne pus le réaliser : le concierge m’apprit qu’il n’y avait pas trois minutes les jeunes gens étaient partis en troïka et que Maria Pétrovna était chez elle. Le sort voulait me prouver qu’il n’est pas toujours permis de regarder la coupole de Saint-Isaac.

Maria Pétrovna était dans ses jours de tristesse, et la conversation ne parvenait pas à s’établir entre nous.

— Naturellement, Lydia Lvovna n’est jamais à la maison, dis-je non sans aigreur.

— Comment, jamais ? Hier, elle n’est pas sortie de la journée.

— Avoir cent personnes chez soi, voilà ce que vous appelez rester à la maison ? Savez-vous, Maria Pétrovna, que vous m’étonnez :