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Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/114

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bonne partie d’un excellent fromage. Assez près de l’arbre sous lequel nous étions, un agréable ruisseau couloit lentement, et formoit une espèce de marais tranquille, dont les eaux étoient brillantes comme de l’argent ou du crystal. Tenez, lui dis-je, rassasiez votre soif de cette belle eau. Il se lève, et, couvert de son petit manteau, il se met à genoux à l’endroit le plus uni du bord du ruisseau, pour satisfaire sa brûlante soif.

Il avoit à peine touché l’eau du bout des lèvres, que la plaie de sa gorge s’ouvre profondément ; l’éponge qui étoit dedans tombe ensuite avec un peu de sang, et son corps, privé de vie, alloit tomber dans l’eau, si, le retenant par un pied, je ne l’eusse retiré sur le bord avec assez de peine. Ayant pleuré mon pauvre camarade, autant que le temps me le permettoit, je le couvris de sable, et le laissai pour toujours dans le voisinage de cette rivière. Quant à moi, tout tremblant et saisi de frayeur, j’allai me cacher dans les endroits les plus écartés et les plus solitaires ; et, comme si j’eusse été coupable d’un meurtre, je me suis banni volontairement de ma maison et de mon pays, et je me suis établi en Ætolie, où je me suis remarié. Voilà ce qu’Aristomènes nous raconta.

Rien n’est plus fabuleux que ce conte, dit celui qui avoit paru si incrédule, dès le commencement ;