Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/364

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et par ses mouvemens différens, qu’il s’échappe de la maison. Mais, quoiqu’il se fût mis en liberté, il ne put se garantir de la mort par la fuite ; car un grand nombre de chiens du voisinage se joignent à ceux qui le poursuivoient, et tous s’acharnent contre lui. Ce fut alors un spectacle bien funeste et bien pitoyable, de voir notre Thrasiléon en proie à cette quantité de chiens en fureur, qui le dévoroient et le mettoient en pièces.

A la fin n’étant plus le maître de ma douleur, je me fourre au milieu du peuple qui s’étoit amassé, et pour donner à mon cher camarade le seul secours qui pouvoit dépendre de moi, je m’adresse à ceux qui animoient encore les chiens : O quel grand dommage, leur disois-je, que nous perdons-là un précieux animal ! mais mon artifice, et tout ce que je pus dire, ne servit de rien à ce pauvre malheureux ; car, dans le moment, un homme fort et vigoureux sort de la maison de Démocharès, et vient enfoncer un épieu dans le ventre de l’ours : un autre en fait autant, et plusieurs que cela avoit rassurés, s’en approchent de plus près, et le percent de coups d’épée. Enfin Thrasiléon, l’honneur de notre troupe, avec un courage digne de l’immortalité, ne laisse point ébranler sa constance, et ne fait pas le moindre cri, ni la moindre plainte qui puisse le trahir et