Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, I.djvu/532

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de notre troupe ont été tués. Je vous jure, dit un troisième, que nous ne ſerons pas plutôt arrivés avec ces hardes, qu’il semble si fâché de porter, que je le jetterai dans quelque précipice pour en régaler les vautours.

Pendant que ces honnêtes gens raisonnoient ainsi entr’eux, sur la manière dont ils me feroient mourir, nous arrivâmes en peu de temps à leur habitation ; car la peur m’avoit, pour ainsi dire, donné des aîles. Ils déchargèrent à la hâte ce que nous apportions, et, sans songer à nous donner à manger, ni à me tuer, comme ils avoient dit, ils se remirent tous en chemin avec précipitation, emmenèrent avec eux leurs camarades, qui étoient restés d’abord à cause de leurs blessures. Ils alloient, disoient-ils, quérir le reste du butin qu’ils avoient fait, dont ils n’avoient pu nous charger.

Je n’étois pas cependant dans une petite inquiétude, sur la menace qu’on m’avoit faite de me faire mourir. Que fais-tu ici, Lucius, disois-je en moi-même, qu’attens-tu ? une mort cruelle que les voleurs te destinent. Ils n’auront pas grande peine à en venir à bout, tu vois bien ces pointes de rocher dans ces précipices ; en quelque endroit que tu tombes, ton corps sera brisé et tes membres dispersés (40). Que ne t’armes-tu d’une bonne résolution ? que ne te sauves-tu pendant que tu le peux faire ? tu as la plus belle occasion du monde de t’enfuir, présentement