Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ordonné. Tout le monde, d’une commune voix, en accusoit un certain Lucius, non sur de foibles conjectures, mais sur des indices très-forts et très-vraisemblables : on disoit qu’il étoit venu quelques jours auparavant avec de fausses lettres de recommandation pour Milon, et que, contrefaisant l’honnête-homme, il avoit si bien gagné ses bonnes graces, que ce vieillard l’avoit logé chez lui ; que ce Lucius étoit regardé comme un de ses meilleurs amis, et que, pendant ce temps-là, il avoit séduit la servante de son hôte, faisant semblant d’être amoureux d’elle, et avoit examiné avec beaucoup de soin toutes les serrures, et les verroux des portes de la maison, et remarqué l’endroit où Milon serroit son argent, et ce qu’il avoit de plus précieux. L’on alléguoit même une preuve bien forte de son crime ; on disoit qu’il s’étoit enfui la nuit, pendant qu’on pilloit la maison, et qu’il n’avoit point paru depuis ce temps-là : on ajoutoit que, pour se garantir de ceux qui le poursuivoient, et aller plus vîte se mettre en sûreté en quelque endroit fort éloigné, il s’étoit sauvé sur un cheval blanc qui étoit à lui. Qu’au reste, on avoit trouvé son valet dans le logis ; que la Justice l’avoit fait mettre en prison, pour lui faire déclarer les crimes et les complices de son maître ; que, dès le lendemain, ce valet avoit été appliqué à la question, et qu’enfin on la lui avoit donné de toutes les manières les plus rigoureuses et les plus cruelles, sans