Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/237

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Le lendemain, la fille du meunier, qu’il avoit eue d’un premier lit, arrive d’un château du voisinage où elle étoit mariée depuis long-temps, et parut dans une affliction terrible, s’arrachant les cheveux, et se frappant continuellement la poitrine avec ses deux mains. Elle savoit tous les malheurs de sa famille, quoique personne n’eût été l’en instruire. Car l’ombre de son père triste et défigurée, ayant encore la corde au col, lui étoit apparue la nuit en songe, et lui avoit révélé le crime de sa belle-mère, ses débauches, les enchantemens dont elle s’étoit servie, et la manière dont il étoit descendu aux enfers, étranglé par un spectre. Après qu’elle eut bien versé des pleurs, et poussé des gémissemens, ses amis qui venoient de tous côtés pour la voir, firent tant auprès d’elle, qu’enfin elle modéra les transports de sa douleur.

Le neuvième jour de la mort de son père (22), elle fit, suivant la coutume, les dernières cérémonies de ses funérailles sur son tombeau. Ensuite elle mit en vente les esclaves, les meubles, et les bêtes de travail dont elle héritoit ; et tout le bien d’une seule maison fut dispersé de côté et d’autre au hasard. Pour moi, je fus vendu à un pauvre jardinier qui m’acheta cinquante deniers ; il disoit que c’étoit bien cher, mais qu’il le faisoit pour tâcher de gagner sa vie par mon travail et par le sien.

Il me semble qu’il est à propos, que je vous rende