Page:Apulée - Les Métamorphoses, Bastien, 1787, II.djvu/357

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même, a vendu, pour le prix de ses plaisirs, la première sentence qu’on ait jamais rendue, qui a causé la perte de toute sa maison. N’avons-nous pas aussi dans la suite un autre jugement fort célèbre, rendu par tous les chefs de la Grèce, quand Palamède, un des plus savans et des plus habiles hommes de son temps, fut condamné comme un traître sur de fausses accusations. Ulisse encore, dont le mérite étoit fort médiocre pour la guerre, n’obtint-il pas les armes d’Achille, par préférence au grand Ajax, si fameux par ses exploits. Mais que dirons-nous de ce jugement qui fut rendu par les Athéniens, ces grands législateurs, ces hommes si sages et si éclairés dans toutes les sciences. Ce vénérable vieillard (Socrate), doué d’une prudence divine, qu’Apollon avoit déclaré le plus sage des mortels, ne fut-il pas opprimé par l’envie et les artifices d’une détestable conspiration, comme s’il avoit été un corrupteur de la jeunesse à qui il n’enseignoit que la vertu, et ne périt-il pas par un poison de cigue, laissant à sa patrie une tache éternelle d’ignominie par sa condamnation ; puisque, même encore aujourd’hui, les plus grands philosophes suivent sa très-sainte secte, préférablement à toutes les autres, et ne jurent que par son nom, dans le desir qu’ils ont d’acquérir le vrai bonheur. Mais de peur que quelqu’un ne blâme la vivacité de mon indignation, et ne dise en lui-même, souffrirons-nous qu’un âne vienne ainsi