Page:Arène - Œuvres, 1884.djvu/80

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gine ; non pas que mademoiselle Reine fût sans mérite, mais dame ! après deux heures de grande musique !… Musique à part, c’était encore un charmant spectacle de voir mademoiselle Reine assise, noyant le tabouret dans les plis de sa robe, et sa taille fine un peu ployée. Mademoiselle Reine chantait timidement, d’une voix claire ; ses beaux cheveux, roulés en corde, suivant la mode du moment, allaient et venaient sur son cou délicat et sa collerette de dentelle ; et les touches du clavier, les noires et les blanches, se courbaient à peine effleurées de ses doigts, et laissaient échapper des fusées de notes joyeuses, comme une ronde de jeunes filles qui éclatent de rire en se dérobant sous un baiser. Je regardais ravi et je songeais à la Reine du pauvre Mitre.

Par malheur, trois fois sur quatre, au plus beau moment de mon extase, quand j’avais la tête perdue dans les nuages de l’amour idéal, à ce moment, comme par un fait exprès, la porte de la cuisine ouverte et mademoiselle Reine s’interrompant, Roset entrait portant à deux mains un grand plateau chargé de verres. Ses yeux de feu s’arrêtaient sur moi invariablement, et ses lèvres rouges me souriaient d’un sourire, hélas ! trop terrestre.

Alors adieu les belles amours ! Reine était adorablement blonde, mais je ne voyais plus que les cheveux abondants et noirs de Roset, si fin crespelés autour du front, que, dans un rayon de