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Page:Arène - Contes de Paris et de Provence, 1913.djvu/15

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LES CLOUS D’OR

— Ah ! mon pauvre homme, mon pauvre homme, si tu fusses né sans bras ni jambes, notre porte aurait des clous d’or !

Ainsi disait Tardive à Jean Bénistan, un soir d’hiver au coin de l’âtre, pendant que les enfants 5 dormaient : et Jean Bénistan ne trouvait rien à répondre, car, depuis longtemps, par sa faute, les affaires du ménage ne florissaient guère.

Non pas que Bénistan fût paresseux ou mauvais homme, au contraire, seulement rien ne lui réussissait.

Sobre, actif, debout avant l’aube, on ne rencontrait que lui par les chemins et par les rues, préoccupé, flairant le vent, et cherchant, là-haut, dans les nuages, un moyen de faire fortune. Généralement, il trouvait une idée chaque matin, — car l’esprit ne lui manquait pas, — des idées superbes Tout, d’abord, allait à merveille. Mais au dernier moment, les dépenses faites, les choses bien en train, quand il n’y avait plus qu’à recueillir les bénéfices, crac ! une catastrophe survenait, et adieu nos projets, adieu nos espérances…

Par exemple, Bénistan avait remarqué que les gens de son endroit, pour aller aux foires et marchés,

faisaient un grand détour à cause de la rivière. Il

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