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CONTES DE PROVENCE

voyais pas très clair et, en tirant, je risquais de tuer Chut… Qui ne vous a pas dit que l’âne eût plus de courage que moi ? Pendant que je perdais mon temps à calculer, lui, à force de se secouer, venait à bout d’arracher sa longe ; il arrivait droit sur le blaireau, lui cassait net l’échine d’un coup de mâchoire, et puis l’achevait, piétinant et montrant les dents comme s’il avait eu envie de rire… Depuis cette affaire, Chut est grand ami de Samson, et Samson n’a pas de plus grand bonheur que lorsque je lui permets de coucher près de Chut, sur la paille de l’écurie. »

Samson et Chut écoutaient, ayant l’air de certifier l’histoire, tandis que le canard, se dodelinant entre nos jambes, poussait de petits coin-coin approbatifs.

« Que voulez-vous, conclut le vieux Mïus, tous les gens de mon temps sont morts, il n’y a plus que mes bêtes qui m’aiment… »

Nous bûmes un dernier coup là-dessus,