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FRIQUETTES ET FRIQUETS

de l’ombre des arbres, ce gazon n’a rien de l’aspect gras et cultivé des ordinaires pelouses, et la terre se voit entre ses brins — un beau hêtre à feuilles luisantes, quelques saules marsault finement argentés, des cytises, des chèvrefeuilles ; toute une végétation bocagère de grands buis au parfum amer, où se nouent, à la saison, ces graines bizarres, joie de notre enfance ! qui rappellent en minuscule les marmites à trois pieds qu’emploient les bohémiens pour cuire leur soupe le long des routes ; de jeunes chênes maigres, comme ceux des taillis, et le tronc doré de lichens avec des crevasses où les oiseaux nichent, une groupe de marronniers géants dont les branches basses, s’étalant horizontales, jettent, sur le sol, poétiquement, un mystère d’antique châtaigneraie.

L’œil y est encore réjoui et l’imagination ramenée à la vie des champs par un papillon qui passe, une brindille qui se relève en fouettant l’air au départ brusque d’un moineau, et par les lignes d’herbe fauchée, menue comme du tabac d’Orient, qui strient autour des endroits ombragés le gazon plus dru des pelouses.