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LES TROIS MERLES

Trois merles surtout m’amusaient. Extraordinaires, ces merles ! Dans une corbeille, fraîchement remuée, de rosiers d’amour en bouton, ils étaient là, amis tous les trois, en train de fouiller du bec — un bec jaune d’or — le terreau humide, et se régalant de menues bestioles et de lombrics prestement happés.

Deux avaient le plumage d’un noir superbe ; celui du troisième tirait sur le gris, et ce devait être une femelle. Ravi de voir un ménage à trois si d’accord, je les observais, peut-être avec l’espoir jaloux qu’à la fin l’idylle se changerait en drame. Eux, d’ailleurs, ne se gênaient pas, habitués à la présence ; de temps en temps même, un des beaux messieurs noirs s’approchaient de la dame grise, fouillant la terre devant elle, lui laissant les morceaux de choix et doucement la caressant.

Un bruit soudain vint nous troubler ; et vite, me laissant seul, le trio galant s’envola.

Je me retournai, furieux ; mais ma fureur ne dura guère.

Sur la rive opposée, du côté où le bruit était venu, fuyait, sa coiffe blanche au vent, une jeune servant bretonne, tandis qu’heureux