de trouver vide un coffret antique et mystérieux, je dénoue le ruban fané qui ferme la tranche du livre.
L’abbé ne m’a pas trompé.
C’est un de ces livres de raison, d’usage commun autrefois dans les familles provençales, mémorandum manuscrit sur les pages respectées duquel, avec les naissances, les morts, les mariages, on relatait, au jour le jour, les gros et menus faits concernant le pays ou la maison.
Mais ces archives domestiques des Gazan ont ceci pour elles qu’elles remontent au delà du xve siècle. Car si, précédant quelques feuilles de la fin demeurées blanches, les dernières pages noircies révèlent, par leur fine et ferme écriture, la main d’une riche bourgeoise, sage contemporaine de la Pompadour, les lettres gothiques du commencement, régulières, ornées, magistrales, sont dues évidemment à la plume savante du clerc de la chapelle ou du tabellion écrivant, attentifs, sous la dictée des châtelaines.
Il y a deux semaines, c’eût été pour moi un régal, une vraie débauche, que de dévorer des yeux, les compulsant, les annotant, au risque