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Page:Arène - La gueuse parfumée - récits provençaux, 1907.djvu/275

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LA MORT DE PAN.


bruit perpétuel des cascades, vous étonnerez-vous que, saisis d’abord d’un religieux respect, ils aient voulu, par-dessus le front des bois, dresser un autel au grand Tout, au dieu en qui se personnifiait l’âme des choses, à Pan, image et représentation de la nature, bienfaisant et formidable comme elle, fait comme elle d’ombre et de jour, divin par sa face resplendissante, et lié à l’animal par ses jambes de bouc, son poil rude et ses cornes ? Vous étonnerez-vous ?…

— Et les voilà bien nos docteurs à la mode, s’écria le curé en m’interrompant, parce qu’ils auront quelque part découvert un endroit commode pour un temple, ils vont, ils vont, leur tête se monte… Mais, à ce compte, vous pourriez supposer un autel païen sur tous les rochers de la contrée.

— Oh ! que nenni, monsieur le curé ; tous les rochers de la contrée ne sont pas, comme celui-ci, centralement placés et visibles de partout ; tous ne figurent pas un piédestal naturel, fait pour tenter un peuple artiste ; tous, enfin, ne portent pas, reconnaissable encore, le nom d’un dieu ; car, à défaut même d’autres preuves, il serait permis de supposer que le nom grec de Pan s’est, sur de grossières lèvres campagnardes, transformé en celui de Pansi, tandis que le dieu lui-même, le dieu de la nature créatrice et de l’universelle génération, devenait peu à peu dans d’étroits cerveaux, San-Pansi, le bon San-Pansi, qui donne aux femmes la fécondité et guérit les enfants