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Page:Arène - La vraie tentation du grand Saint Antoine - contes de Noël, 1880.djvu/18

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la vraie tentation du grand saint antoine.

vendre une broche, cette infernale idée de manger Barrabas poussait ses racines au dedans de moi.

Je rêvais broches, je voyais broches. Vainement je multipliais les mortifications et les pénitences ; pénitences et mortifications n’y faisaient rien. Et le jeûne, le jeûne lui-même ne faisait que surexciter mon appétit. Je fuyais Barrabas, je n’osais plus l’emmener dans mes quêtes, et lorsqu’à mon retour, frétillant de la queue, il venait affectueusement frotter sur mes pieds nus les rudes soies de son échine, je détournais les yeux bien vite et n’avais pas le cœur de le caresser.

Mais je crois, mes enfants, que tout ceci ne vous intéresse guère, et peut-être préféreriez-vous…

— Non ! bon saint Antoine.

— Continuez, grand saint Antoine.


— Je continuerai donc, quoiqu’il m’en coûte de réveiller d’aussi pénibles souvenirs. Que de tentations ! que d’épreuves !