Page:Arène - Les Ogresses - Tremblement de terre à Lesbos - Ennemie héréditaire.djvu/118

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laisser s’embroussailler au vent de la rue, sans que jamais un bout de ruban en relevât la naturelle beauté, ses cheveux courts et lourds, vivants, roulés comme des copeaux d’or.

Certes ! au point de vue de la saine morale, il aurait infiniment mieux valu qu’au lieu de quitter Belleville pour venir se perdre au quartier Latin, Azélie continuât à mourir de faim dans son taudis de la rue des Envierges, et à savourer chaque soir, après une journée d’inutiles courses, l’âpre joie d’être vertueuse en se fourrant seule entre deux draps raides et glacés comme deux feuilles de fer-blanc.

Azélie ne demandait pas mieux. Mais quoi ? pour mourir de faim vertueusement dans un taudis, encore faut-il avoir un taudis. Et Azélie n’en avait plus. Le montage des perles fausses qui, de temps en temps, lui faisait gagner quelques journées, ayant radicalement cessé au commencement de l’hiver, le propriétaire, après deux loyers non payés, l’avait expulsée au demi-terme.

Azélie songea d’abord à revenir chez son père, qui n’était pas précisément un méchant homme et ne la battait guère que lorsqu’il avait bu, c’est à dire tout au plus trois fois par semaine.

Seulement où retrouver ce doux ivrogne ? Disparu, il n’avait plus donné de ses nouvelles depuis je ne sais combien de mois.