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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/224

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dans la vive amitié qui l’unissait à notre confrère, la force de s’associer aux tristes soins dont il était l’objet : il alla aussi s’établir à Ville-d’Avray. C’est M. Duleau qui nous apprit le premier combien peu Fresnel se faisait illusion sur son état. « J’eusse désiré, s’écriait-il quelquefois, quand la présence d’une mère et d’un frère qu’agitaient de si poignantes inquiétudes ne lui commandait pas une réserve que sa tendresse n’enfreignit jamais ; j’eusse désiré vivre plus longtemps, car je sens qu’il y a dans l’inépuisable carrière des sciences, un grand nombre de questions d’utilité publique dont peut-être j’aurais eu le bonheur de trouver la solution. » Fresnel habitait déjà la campagne lorsque la Société royale de Londres me chargea de lui présenter la médaille de Rumford. Ses forces, alors presque épuisées, lui permirent à peine de jeter un coup d’œil sur ce signe, si rarement accordé, de l’estime de l’illustre Société. Toutes ses pensées s’étaient tournées vers sa fin prochaine, tout l’y ramenait : « Je vous remercie, me dit-il d’une voix éteinte, d’avoir accepté cette mission ; je devine combien elle a dù vous coûter, car vous avez ressenti, n’est-ce pas, que la plus belle couronne est peu de chose, quand il faut la déposer sur la tombe d’un ami ? »

Hélas ! ces douloureux pressentiments ne tardèrent pas à s’accomplir. Huit jours encore s’étaient à peine écoulés, et la patrie perdait l’un de ses plus vertueux citoyens, l’Académie l’un de ses membres les plus illustres, le monde savant un homme de génie.

En apprenant la mort prématurée de Côtes, jeune géomètre dont les premiers travaux faisaient concevoir de grandes espérances, Newton prononça ces mots, si