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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/359

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le regretter, car le plénipotentiaire de Mourad était une femme, cette même Sitty Néfiçah, que Kléber a immortalisée en proclamant sa bienfaisance, son noble caractère dans le bulletin d’Héliopolis, et qui, du reste, était déjà célèbre d’une extrémité de l’Asie à l’autre, à cause des révolutions sanglantes que sa beauté sans pareille avait suscitées parmi les mameluks.

L’incomparable victoire que Kléber remporta sur l’armée du grand vizir n’abattit point l’énergie des janissaires qui s’étaient emparés du Kaire pendant qu’on combattait à Héliopolis. Ils se défendirent de maison en maison avec un courage héroïque. On avait à opter entre l’entière destruction de la ville et une capitulation honorable pour les assiégés. Ce dernier parti prévalut : Fourier, comme d’habitude, chargé de la négociation, la conduisit à bon port ; mais, cette fois, le traité ne fut pas discuté, convenu et signé dans l’enceinte mystérieuse d’un harem, sur de moelleux divans, à l’ombre de bosquets embaumés. Les pourparlers eurent lieu dans une maison à moitié ruinée par les boulets et par la mitraille ; au centre du quartier dont les révoltés disputaient vaillamment la possession à nos soldats ; avant même qu’on eût pu convenir des bases d’une trêve de quelques heures. Aussi, lorsque Fourier s’apprêtait à célébrer, suivant les coutumes orientales, la bienvenue du commissaire turc, de nombreux coups de fusil partirent de la maison en face, et une balle traversa la cafetière qu’il tenait à la main. Sans vouloir mettre en question la bravoure de personne, ne pensez-vous pas, Messieurs, que si les diplomates étaient ordinairement placés dans des positions aussi péril-