Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/395

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un projet. L’assemblée en discutait minutieusement les termes, lorsqu’un officier de gendarmerie, ancien soldat des armées impériales, s’écria rudement : « Messieurs, dépêchez-vous ; sans cela toute délibération deviendra inutile. Croyez-moi, j’en parle par expérience ; Napoléon suit toujours de bien près les courriers qui l’annoncent. » Napoléon arrivait en effet. Après un court moment d’hésitation, deux compagnies de sapeurs, qui avaient été détachées pour couper un pont se réunirent à leur ancien général. Un bataillon d’infanterie suivit bientôt cet exemple. Enfin, sur les glacis mêmes de la place, en présence de la nombreuse population qui couronnait les remparts, le 5e régiment de ligne tout entier prit la cocarde tricolore, substitua au drapeau blanc l’aigle témoin de vingt batailles qu’il avait conservé, et partit aux cris de vive l’Empereur ! Après un semblable début, essayer de tenir la campagne eût été une folie. Le général Marchand fit donc fermer les portes de la ville. Il espérait encore, malgré les dispositions évidemment hostiles des habitants, pouvoir soutenir un siège en règle, avec le seul secours du 3e régiment du génie, du 4e d’artillerie et des faibles détachements d’infanterie qui ne l’avaient pas abandonné.

Dès ce moment, l’autorité civile avait disparu. Fourier crut donc pouvoir quitter Grenoble et se rendre à Lyon, où les princes étaient réunis. À la seconde Restauration, ce départ lui fut imputé à crime. Peu s’en fallut qu’il ne l’amenât devant une cour d’assises, ou même devant une cour prévôtale. Certains personnages prétendaient que la présence du préfet au chef-lieu de l’Isère