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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 1.djvu/420

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remarquables par la finesse, par la fermeté, par la précision du trait. Ce n’était donc pas sans raison, quoi qu’on en ait pu dire, que Watt parlait avec complaisance de son adresse manuelle.

Peut-être aurez-vous quelque raison de penser que je porte le scrupule bien loin en réclamant, pour notre confrère, un mérite qui ne peut guère ajouter à sa gloire. Mais, je l’avouerai, je n’entends jamais faire l’énumération pédantesque des qualités dont les hommes supérieurs ont été pourvus, sans me rappeler ce mauvais général du siècle de Louis XIV, qui portait toujours son épaule droite très-haute, parce que le prince Eugène de Savoie était un peu bossu, et qui crut que cela le dispensait d’essayer de pousser la ressemblance plus loin.

Watt atteignait à peine sa vingt et unième année, lorsque l’Université de Glasgow se l’attacha. Il avait eu pour protecteurs Adam Smith, l’auteur du fameux ouvrage sur la Richesse des nations ; Black, que ses découvertes touchant la chaleur latente et le carbonate de chaux devaient placer dans un rang distingué parmi les premiers chimistes du XVIIIe siècle ; Robert Simson, le célèbre restaurateur des plus importants traités des anciens géomètres. Ces personnages éminents croyaient d’abord n’avoir arraché aux tracasseries des corporations, qu’un ouvrier adroit, zélé, de mœurs douces ; mais ils ne tardèrent pas à reconnaître l’homme d’élite, et lui vouèrent la plus vive amitié. Les élèves de l’Université tenaient aussi à honneur d’être admis dans l’intimité de Watt. Enfin sa boutique, oui, Messieurs, une boutique ! devint une sorte d’académie où toutes les illustrations de Glasgow