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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 13.djvu/163

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tres expériences eussent montré que les miroirs métalliques réfléchissent en même temps les rayons qu’ils polarisent en deux sens diamétralement opposés. C’est en effet là ce que des observations directes m’avaient appris depuis longtemps ; mais une circonstance de ce phénomène tout aussi étrange que la polarisation des rayons m’avait échappé, parce que je n’avais pas assez attentivement examiné ce qui se passe en dessous de l’angle qui correspond à la disparition d’une des suites. L’observation qui a ramené mon attention sur ce premier objet est, si je ne me trompe, assez extraordinaire pour mériter d’être rapportée.

« Les artistes appliquent presque toujours un vernis formé en grande partie d’une dissolution de gomme laque dans l’alcool sur leurs ouvrages en cuivre, ce qui les empêche de se ternir. Mais lorsque avec un pinceau ils déposent le vernis sur la plaque encore chaude, l’alcool s’évapore et la gomme laque forme un enduit d’une épaisseur insensible, sur lequel on aperçoit distinctement des couleurs. Dans les couvercles de lunettes ces couleurs sont quelquefois disposées en anneaux réguliers, ce qui tient aux sillons circulaires que le polissoir avait formés lorsqu’on tournait la pièce, et aux couches inégales de gomme laque qui sont venues les remplir.

« J’avais pensé à profiter des couleurs tranchées que j’apercevais sur le couvercle d’une des lunettes de l’Observatoire, pour rechercher si elles se comporteraient dans les phénomènes de la double réfraction comme celles qu’on forme artificiellement lorsqu’on place une lentille de verre sur un miroir métallique. Ces couleurs, comme celles des anneaux ordinaires, changent de teinte avec l’inclinaison, parce que les rayons traversent alors des épaisseurs différentes du milieu diaphane ; mais elles présentent de plus un phénomène extrêmement remarquable, car par un temps serein le couvercle change de teinte dans une direction et sous une inclinaison déterminées avec l’heure du jour, et dans un instant quelconque avec l’azimut dans lequel le corps est placé. Pour abréger je ne rapporterai que les expériences que j’ai faites au coucher du Soleil.

« Je vise au couvercle à l’œil nu, sous un angle très-aigu et dans la direction du Soleil couchant : le couvercle est d’un vert sale tirant sur le bleu.

« Toutes les autres circonstances étant les mêmes, je me tourne vers le sud, ou plus exactement vers un point de l’horizon éloigné du Soleil de 90° environ. La plaque de cuivre, qui d’abord était verte, passe au pourpre très-vif.

« Lorsque le couvercle est éclairé par les rayons qui partent des