père, beaucoup moins endurants qu’un père et qu’une mère, réprimeront avec rudesse des mouvements de vivacité beaucoup trop fréquents. Dans l’âge mûr, Ampère aura ainsi appris à maîtriser les excès de colère qui le rendaient si malheureux, ces colères d’agneau, comme les appelaient ses amis, et dont, en vérité, on se félicitait d’être devenu l’objet, tant il y avait de spontanéité, de candeur, d’abandon, dans le retour. Il saura s’astreindre à des travaux réguliers. L’obligation de présenter ses devoirs à heure fixe, lui enseignera, comme disait un auteur fort expert dans la matière, à faire sortir rapidement la pensée d’un tuyau de plume, à ne pas la noyer ensuite dans une écritoire. Suivant la belle image de Cléanthe conservée par Sénèque, la pensée d’Ampère, une fois contenue, ressemblera à la voix qui, resserrée dans l’étroit canal d’une trompette, sort plus aiguë et éclate plus fort. La rédaction devenant alors pour lui une chose secondaire, il aura peut-être le bonheur de pouvoir dire comme Racine : « Mon ouvrage est fait, il ne me reste plus qu’à l’écrire. » Les succès de ce mode de recherches le feront renoncer à traiter mille sujets à la fois, à céder en ce genre à la moindre excitation. En réfléchissant sur le temps perdu journellement en discussions sans portée, il n’aura pas à s’écrier douloureusement avec le poëte que je citais tout à l’heure :
Et je fais le mal que je hais.
Je m’arrête, car au lieu de tenir une balance égale entre deux systèmes contraires, comme j’en avais le