Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/105

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La calomnie, toujours aux aguets des occasions d’exercer son détestable rôle, se mit aussi de la partie ; et voilà comment il arrive que je n’aurais pas atteint mon but, si je négligeais de donner une esquisse fidèle du caractère et des habitudes d’Ampère.

Je viens de parler de calomnie ! Il est assurément bien loin de ma pensée de vouloir appliquer cette expression sévère à quiconque ne partage pas aujourd’hui l’opinion que je me suis formée du caractère d’Ampère. Philopœmen porta une fois, dit Plutarque, la peine de sa mauvaise mine. Ampère aussi porta souvent la peine de certaines manières, de certaines habitudes dont je n’entends nullement me faire le prôneur. Je le reconnais : de la meilleure foi du monde, on a pu, par exemple, prendre des salutations vraiment trop profondes pour un manque de dignité.

Nous avons traversé des temps où un homme de lettres, où un homme de science, s’appelât-il Ampère, avait toute raison de craindre que ses emplois ne lui fussent enlevés, s’il n’était pas orthodoxe en matière de religion et partisan des systèmes politiques du jour. Peut-être, dans ces circonstances, notre confrère se rappelait-il trop vivement ses devoirs de père de famille ; peut-être une imagination ardente lui peignant alors sous des couleurs exagérées la position où l’aurait réduit une destitution brutale, Ampère se prêta-t-il à des démarches, à des visites, à des présentations qu’on a pu loyalement, légitimement blâmer. C’est un droit que je concède, même en ce moment, à ceux qui jamais ne firent de semblables fautes ; mais je le dénie, sans hésiter, aux fonctionnaires